Bonjour à tous et bienvenue sur Master Danse. Aujourd’hui je vais vous parler de « 13 Tongues », un spectacle de Chen Tsung-lung. C’est le nouveau chorégraphe d’une compagnie taïwanaise : la « Cloud Gate Dance Theater of Taiwan ». J’ai vu cette pièce à l’occasion de sa représentation au théâtre de Chaillot. Je trouve ça très bien que ce genre de pièces soit proposé en France. On peut remercier l’équipe de Chaillot pour la richesse de leur programmation.
La critique
Alors que les lumières sont encore allumées, les danseurs entrent par l’avant scène, au rythme d’un son de cloche. Ils sont dans une dynamique très ronde, fluide et calme. Ces corps investissent progressivement l’espace scénique, toujours très ancrés et posés. Et soudain, un cri vient tout perturber. Un cri de douleur, d’une douleur vive. Les bruitages, très métalliques, viennent accompagner cette exclamation. Les danseurs vont alors se séparer pour se réorganiser en plus petits groupes. Plusieurs histoires se déroulent en même temps sous nos yeux, contribuant à rendre la pièce légèrement confuse. Vous comprendrez mieux après un rappel de son histoire.
Le chorégraphe Cheng Tsung-lung, actuel directeur artistique de la compagnie taïwanaise Cloud Gate 2 et qui prendra la direction du Cloud Gate Dance Theatre à la fin de l’année 2019, a toujours été fasciné par les histoires de sa mère. L’une d’entre elles évoque celle du conteur Thirteen Tongues (« treize langues »), un artiste de rue capable d’imiter tous les personnages pittoresques de Bangka, le plus ancien quartier de Taipei. Dans cette pièce, Cheng Tsung-lung convoque ses souvenirs d’enfance entre rites taoïstes et rues très animées de Bangka, pour les mêler dans une sorte de ballet fantastique et assez chimérique. Très empreinte de mystère sacré et de fantaisie, la chorégraphie fait surgir des fantômes virevoltants aux mille couleurs, qui prennent corps via cette déesse qui flotte, ou ce poisson volant qui disparaît au milieu de nul part. Les danseurs chantent des mantras taoïstes, chancellent et tremblent comme des chamans enchantés, comme si les milliers d’esprits errants du vieux Bangka étaient venus nous visiter.
AGNÈS IZRINE (chaillot)
Je disais donc que cette pièce était un peu confuse ; aussi bien d’un point de vue narratif, que d’un point de vue technique (lumières, vidéo). Narratif car on nous propose une pièce reposant sur un conte taïwanais inconnu en France, transmis par beaucoup de mantras et de cris. Il est donc parfois difficile de comprendre ce qui se passe devant nous, spécialement car il s’en passe beaucoup ! Et technique car le chorégraphe a décidé d’incorporer de la vidéo à la danse. Cela aurait pu être magnifique mais c’était bien trop classique. Tout est projeté en 2D, sans relief à la projection, sans lien évident avec les lumières qui ne sont pas, elles non plus, très travaillées. Un point positif à noter est l’utilisation de costumes fluos avec de la lumière bleue. Cette partie m’a beaucoup plu pour sa belle dynamique de groupe, calme et puissante.
Malgré tout, j’ai quand même beaucoup aimé ce spectacle. Mais alors pourquoi ?
J’ai tout simplement été fasciné par ces danseurs. On est face à des corps conscients, remplis et sentis. J’ai rarement vu une telle qualité de mouvement en France. C’est sans doute grâce à leur pratique quotidienne de disciplines axées sur la sensation telles que le Qi Gong ou la méditation. Leurs mouvements sont tellement sentis, précis et aboutis qu’on en oublie leur difficulté. Les danseurs maîtrisent toutes les dynamiques nécessaires et jonglent avec elles avec une fluidité impressionnante. Bref, leur sensibilité m’a beaucoup touché et a fait écho dans ma recherche personnelle de danseur.
Ma conclusion
Pour conclure, je dirais donc que 13 Tongues est une pièce trop fournie, au point de nous perdre dans son histoire et dans sa narration. En revanche, cette troupe est sans doute l’une des plus belles du monde, et rien que pour ça, un grand Bravo. Si je n’ai pas su apprécier l’histoire, tout comme d’autres médias, c’est probablement parce que le public français (moi y compris) est plutôt inadapté à la culture asiatique, et étrangère en général (et aussi car je n’ai pas compris un mot de ce qu’ils racontaient 😉 ). Dans une optique d’ouverture sur d’autres cultures, ce ballet a très largement sa place dans un théâtre national tel que Chaillot. Encore merci à eux pour leur programmation riche et variée…
Voilà, c’est tout pour cet article, n’hésitez pas à faire vos retours en commentaire et à vous abonner à notre Newsletter.
Bonjour,
Voici un article assez étonnant, qui, à mi lecture, laisse entrevoir au lecteur un spectacle trop complet, trop rempli, un article qui pourrait, si on en arrêtait là la lecture, ne pas nous entraîner à Chaillot. Mais voilà, tout à coup, l’article se met à parler de ses fabuleux danseurs; et là, tout bascule. Ces quelques mots sur ces danseurs nous donnent finalement envie d’aller voir ces femmes et ces hommes d’une autre culture, d’une autre sensibilité, ces femmes et ces hommes dont on comprend que la sensibilité et la technique sont en tous points remarquables, ces femmes et ces hommes (mais aussi cet article…) qui me font finalement regretter de ne pas être allé à Chaillot…
Horus Lane.